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La soumission à l’autorité…

une expérience sur l’obéissance [1/2]


 
Définition :
Lorsque l'on parle de soumission, en psychologie sociale, c'est pour faire référence au comportement de quelqu'un devant une exigence visant à obtenir de lui une approbation, un comportement, ou un changement cognitif ou perceptif. L'exigence,  implicite ou explicite, pouvant provenir d'un individu ou d'un groupe.

Voici, pour illustrer ce champ de recherche, une expérience de Stanley Milgram, réalisée en 1964 aux Etats-Unis.

Le but de l’expérience est de tester le taux d’obéissance d’un sujet soumis à un ordre révoltant, donné par une autorité scientifique, en l’occurrence, envoyer jusqu’à 450 V à une personne lorsqu’elle réponds mal à une question.
 
Les sujets ont répondu à une annonce dans un journal local sollicitant la participation de gens de toutes professions à une étude sur la mémoire et l’apprentissage, moyennant une rétribution de quatre dollars et une indemnité de transport de cinquante cents pour une heure de collaboration. Il s’agit donc d’un un vaste échantillonnage d’individus venus des diverses classes de la société : 40%  d’ouvriers, 40% d'employés de bureau, de vendeurs et d’hommes d’affaires, 20% de cadres, et de tous ages.
 
Précisons que c’est dans le luxueux laboratoire Interaction de l’université de Yale que se déroula l’expérience. Ce détail a son importance, car le choix d’un tel local garantissait la légitimité des recherches.
 
Chaque expérience nécessite deux personnages : l’un est dit « naïf », dans le sens ou il ne connaît pas le but réel de l’expérience; il en est le sujet. L’autre est complice des chercheurs.
 
Lors de son arrivée, on explique un peu mieux au sujet « naïf »  le thème prétexté de l’expérience : « Ce que nous cherchons à déterminer, c'est l’effet réciproque de la relation moniteur/élève chez des personnes différentes ainsi que l’effet de la punition sur l’apprentissage dans ce type de situation. »
 
Voici le principe de l’expérience : on tire au sort parmi les 2 sujets, un « élève » et un « moniteur ». Par un hasard quelque peu influencé par les expérimentateurs, ce rôle d’« élève » est toujours joué par le sujet complice. Il est attaché sur une chaise électrique, munie de sangles «destinées à empêcher toute gesticulation excessive lors de la réception des chocs», cela, afin que le sujet soit bien persuadé que l’élève ne pourrait en aucun cas se libérer. En réponse à une question de l’élève, l’expérimentateur déclarait: « Même si les chocs sont extrêmement douloureux, ils ne risquent pas de provoquer de lésion permanente. »
 
Le sujet « naïf », le moniteur, sait qu’il aurait très bien pu être assis à la place de l’élève, puisqu’il croit que cette situation ne dépendait que d'un tirage au sort. Afin de le renforcer dans sa conviction que l’appareil déclenche réellement des décharges électriques, on lui fait recevoir au poignet un choc témoin de quarante-cinq volts obtenu en abaissant une manette du stimulateur.
 
On donne au moniteur une série de couples de mots à lire à l’élève, qui devra les associer et les retenir. L’expérimentateur lui demande d’administrer une décharge électrique à l’élève chaque fois que celui-ci fournirait une mauvaise réponse. De plus il doit augmenter d’un niveau de voltage à chaque erreur commise (15V, puis 30, 45… jusqu’à 450V). En même temps, il est prié d’annoncer à haute voix le voltage correspondant avant d’abaisser la manette, cela afin de garder bien présent à l’esprit l’accroissement d’intensité des chocs qu’il administrait. Sur le panneau de contrôle du stimulateur, des labels (« choc léger », « modéré » …  « 450V : attention, choc dangereux ».) informent le sujet sur les conséquences des chocs électriques.
 
Un commentaire de milgram :
           « Au cours des études pilotes, nous avions pensé que le fait de lire à haute voix les indications de voltage et les mentions verbales portées sur le tableau de commande créerait chez le sujet une tension nerveuse suffisante pour l’inciter à désobéir. Toutefois, ce n’est pas ce qui se passa. En l’absence de protestations de la part de l’élève, presque tous les sujets des études pilotes poursuivirent allégrement jusqu’à la dernière manette du tableau de commande, sans paraître impressionnés par les mentions verbales accompagnant les indications de voltage […] Il fallait donc faire intervenir une force qui augmenterait la résistance des sujets aux ordres de l’expérimentateur; la répartition des points de rupture révélerait leurs différences de tempérament. »
 
Cette force, ce fut l’introduction des protestations de la victime dans la méthode expérimentale. En gros, l’élève/complice ne manifestait aucun désagrément jusqu’à soixante-quinze volts. À partir de ce niveau, il poussait un léger gémissement. À cent vingt volts, il criait à l’expérimentateur que les chocs devenaient douloureux. A partir de cent cinquante volts, il demandait avec insistance qu’on le libère. Quand le choc atteignait trois cents volts, il disait d’une voix désespérée qu’il ne fournirait plus aucune réponse à l’exercice d’apprentissage. Ceci eut pour effet de réduire légèrement la moyenne des chocs maxima et de créer quelque diversité dans la prestation des sujets.
 
Lorsque le sujet « moniteur » hésite à poursuivre l’expérience, l’expérimentateur lui ordonne, d’un ton « ferme mais courtois », de continuer. Ce n’est qu’après 4 injonctions successives infructueuses que l’on arrête le test.

 
Réfléchissez en vous mettant en situation, jusqu'à quel niveau seriez vous allé ?
 
La question a été posée à des psychiatres, des étudiants diplômés et des professeurs de sociologie, des étudiants de deuxième année et des adultes des classes moyennes ont été consultés. Les prévisions de ces différents groupes présentent une surprenante similitude : toutes indiquent le refus d’obéissance quasi unanime des sujets, à l’exception d’une frange de cas pathologiques n’excédant pas un ou deux pour cent qui continueraient jusqu’à la dernière manette du tableau de commande.
 
D’après les résultats de l’expérience : les 2  tiers des sujets obéissent jusqu’au dernier choc de 450 Volts !


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